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25/12/2018

Victor Mara

Juste retour des choses


Que les photos de la France en révolte sont belles ! Paris revit enfin ! Cette ville qui crevait sous l’embourgeoisement de droite et de gauche, sous le Commerce et la Banque, sous le fric et les fringues, craque de partout mais elle craque de vie, de soulagement, d’espoir. Cinquante ans après son expulsion, le grand peuple (qui a osé parler de « petit peuple » ?) réinvestit Sa ville, il revient là d’où le libéralisme l’avait chassé. Chassez le peuple, il revient au galop. Le réveil d’un peuple ça change des Black Friday, des soldes d’hiver et de la queue pour les macarons Ladurée. Mais bon, il paraît qu’ils sont bons.

Quand la France se réveille, c’est toute l’Europe qui tremble. Belgique, Allemagne, Portugal, Pologne commencent à enfiler leurs gilets jaunes. Les idées géniales ont toujours été simples : il suffit d’ouvrir la boite à gants, d’endosser la tenue de sécurité et n’importe qui se change en résistant au mondialisme. Puisque l’objectif n’est plus de limiter la taxe sur les carburants (la doléance de départ), mais de reprendre le pouvoir abandonné aux instances mondialistes, supranationales, européennes ou autres.

 

Le Grand soir est là et la presse ne veut pas le voir


Le peuple réveillé a pris goût à la parole, à la revendication et au combat et il sera très difficile de le rendormir, de le renvoyer dans sa niche, une niche de moins en moins chaude. Il faut croire que le peuple français est plus qu’une addition de Français (le tout > la somme des parties) : au cœur de ce peuple pas comme les autres bat un esprit qui ne meurt pas, que personne ne peut réduire, pas même les pires mondialistes (Macron, Sarkozy ou Hollande) à la tête des pires politiques (chômage, terrorisme et immigration de masse). Il y a fort à parier que c’est la grande armée en jaune qui va faire contagion plutôt que le quarteron de généraux en retraite, en charpie, en Bérézina que sont les Macron, Philippe, Castaner, Griveaux, Darmanin, tous ces résidus de l’alternance.

L’avenir dira si Novembre 2018 se hissera à la hauteur de ses grandes aînées 1789, 1830, 1848 et 1871. Mais après ce cinquième samedi d’action, vu l’état délabré des forces de l’ordre bancaire, les Gilets pourraient bien prendre un jour l’Elysée et attraper Macron. Pour lui faire quoi ? Rien de douloureux car ce président élu par l’alliance des Médias et de la Banque est devenu un fantôme depuis ce samedi noir du 8 décembre où il a littéralement disparu. Ce jour-là la France n’était plus gouvernée et elle allait bigrement mieux malgré les hurlements des journalistes affolés : Anarchie ! Chaos ! Insurrection !

 

Pas d’omelette (révolutionnaire) sans casser des œufs (oligarchiques)


Des commerçants ont perdu leur magasin car le fleuve jaune a charrié ses inévitables cailloux : casseurs du Renseignement déguisés en gauchistes et cas sociaux venus des ghettos pour piller la Marchandise. Ces deux formations parasites n’ont pas réussi à désorienter le mouvement car ni les flics-antifas ni les racailles (même engeance, mêmes méthodes, même but) ne sont porteurs de revendications. Ils sont à l’inverse le moyen de retourner les revendications sociales en appels à l’ordre, à la répression, à la léthargie. Ces aimants à matraquage attirent la foudre sur les Gilets : les handicapés, les retraités, les jeunes filles ne sont pas épargnés. Une injustice de plus dans la grande masse des injustices qui caractérisent ce système.

Ces coups physiques font moins mal que les coups sociaux de la Banque à travers les décisions du gouvernement : la baisse inexorable des salaires par la hausse cachée du coût de la vie (le TGV inabordable, la facture EDF qui grimpe toute seule), la paupérisation expliquée par la « communication » et la mondialisation par la fatalité. Tous ces changements (les spoliateurs appellent ça des « réformes ») font bien plus de dégâts existentiels qu’un nuage de lacrymo ou qu’un bâton sur une tête de Gaulois réfractaire. Et puis les coups réveillent la bête : le peuple français reprend goût à la résistance et à la castagne mais pour ça il a fallu lui taper longtemps sur la tête.« Les coups, oui ça fait mal » chantait Johnny, qui avait peut-être compris qu’ils étaient le passage obligé vers la conscience de classe.

 

Taper sur le système


Pour renaître, le peuple français a dû fracasser sa coquille, une coquille faite de tous les interdits qui entravaient ses pensées, ses paroles, ses actions. Dès qu’un Français ouvrait sa gueule, les gardiens de la pensée dominante lui tombaient dessus et le harcelaient. BHL, Aphatie, Duhamel, Barbier, Cohen, Salamé, BFM, France Inter, plus personne ne peut les supporter. Ce régime autoritaire entretenu par la peur et parfois par la terreur quand il est trop contesté (Paris 2015, Nice 2016, Strasbourg 2018) favorise le complotisme : les Français finissent par chuchoter, ils ne disent plus ce qu’ils pensent, se méfient du voisin, deviennent paranos. Les Gilets jaunes ont fait péter tout ce carcan en envoyant un gigantesque « merde » au système. Victor Hugo aurait dit ça de plus jolie façon avec son sens de la formule et son souffle épique.

Il était temps de se retrouver, de se reparler, même autour de ronds-points (« La révolte des ronds-points » écrit avec une pointe de mépris Florence Aubenas dans le journal Le Monde), et de refonder une politique commune par le bas, celle d’en haut étant complètement pourrie, rejetée, haïe. Le sentiment populaire national revient en force, bouscule toutes les barrières et envoie cul par-dessus tête les gardes-barrière, ces « chiens de garde » décrits par Serge Halimi. Quel régime pourra résister à cinq, dix, vingt samedis d’assaut ? Aucun. La démonstration de force a suffi en quelques actes à révéler les limites du pouvoir, sa faiblesse intrinsèque, sa vulnérabilité ultime : entre les banquiers et le peuple il n’y plus que des policiers. Sans eux, les banquiers ne tiendraient pas dix minutes.

 

Victor Mara

24/12/2018

Un choix à faire

23/12/2018

Porto Vecchio

Julien Doré - Porto Vecchio from Brice VDH on Vimeo.

05:08 Publié dans Musique | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : julien doré |  Facebook

22/12/2018

Michéa (sur les gilets jaunes)

 

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Les gilets jaunes vus depuis le pays d’en bas, par Jean-Claude Michéa

 

Source : Sud Ouest, Jean-Claude Michéa, 18-12-2018
 

Le mouvement des gilets jaunes est une révolte morale spontanée contre un système économique aussi absurde qu’injuste, estime Jean-Claude Michéa

Si j’ai choisi de vivre, depuis maintenant plus de deux ans, dans un petit village des Landes – à 10 kilomètres du premier commerce, du premier café et du premier médecin (26% des communes françaises, mondialisation oblige, sont déjà dans ce cas), c’est bien sûr d’abord parce que le mode de vie hors-sol, standardisé et « festif » de Montpellier m’était devenu insupportable.

Et sans doute aussi parce que j’étais assez « réactionnaire », ou assez épicurien, pour oser encore croire qu’une tomate cultivée sur place et sans manipulation chimique aurait forcément un tout autre goût que son ersatz industriel importé de Chine ou d’Australie par containers géants (lesquels, au passage, utilisent un fioul nettement plus polluant – quoique non taxé ! – que celui des voitures diesel).

La colère généreuse des gilets jaunes

Bien entendu, un tel changement d’univers a aussi un aspect politique. D’une part, parce qu’il correspond habituellement à une volonté d’introduire un peu plus de cohérence dans sa vie personnelle (je ne voulais pas ressembler à ces intellectuels de gauche qui célèbrent sans cesse la « mixité sociale » tout en se gardant bien d’habiter dans les quartiers les plus « sensibles » !). Et de l’autre, parce que le fait de vivre au cœur d’une région rurale m’offrait l’occasion de vérifier par moi-même à quel point la description de la France « périphérique » par Christophe Guilluy – description pourtant longtemps moquée par toute la « sociologie » mandarinale – collait au millimètre près à la réalité que j’avais sous les yeux. Et de fait, il suffit de partager la vie de ces petits paysans, artisans, éleveurs ou retraités pour lesquels – malgré leur sens aigu de l’entraide – chaque fin de mois est devenue un casse-tête insoluble, dans une région aux paysages sauvages et magnifiques mais où presque tous les transports en commun et services de proximité (pour ne rien dire des problèmes de couverture téléphonique) ont été méthodiquement sacrifiés sur l’autel des dogmes libéraux, pour que la colère généreuse des gilets jaunes – l’expression est d’Orwell – prenne aussitôt tout son sens !

« Ceux d’en haut » et « ceux d’en bas »

A quoi, en effet, assistons-nous aujourd’hui sinon au retour, sous une forme inédite, de cette « question sociale » (autrement dit, de ce conflit d’intérêt qui oppose toujours, même de façon latente, « ceux d’en haut » et « ceux d’en bas ») qui, il y a peu, figurait encore au centre de toute critique socialiste ? Or c’est justement cette question sociale, et avec elle, l’idée même de « lutte des classes », que la gauche européenne – depuis sa conversion massive, au début des années 1980, au libéralisme économique, politique et culturel – tente par tous les moyens de noyer sous le flot continu de ses fameuses « questions sociétales ». De nos jours, « être de gauche » ne signifie plus, en effet, combattre un système économique et social injuste fondé sur l’accumulation sans fin du capital. C’est, au contraire, chercher à substituer à ce combat l’unique croisade libérale « contre toutes les discriminations » – de la défense de l’écriture « inclusive » au rejet de l’alimentation carnée, en passant par l’interdiction de la fessée. Il est donc clair que la gauche est aujourd’hui devenue une force objectivement contre-révolutionnaire. Et il ne faut donc pas s’étonner si le fossé qui la sépare des classes populaires – et par conséquent de cette France périphérique où vivent la majorité des Français – ne cesse de s’agrandir (songeons, par exemple, à l’état d’hébétude dans lequel l’apparition du mouvement des gilets jaunes a plongé toute l’intelligentsia de gauche (1)).

Situation encore aggravée par le fait que cette nouvelle gauche trouve désormais son centre de gravité électoral dans ces classes moyennes urbaines, surdiplômées et hyper-mobiles, qui non seulement ne représentent que 10 à 20% de la population mais sont aussi massivement protégées contre les effets de la mondialisation – quand encore elles n’en profitent pas. C’est d’ailleurs sans doute la raison pour laquelle mon appel récurrent à réhabiliter la critique socialiste dérange autant les mandarin(e)s de gauche. Comme le soulignait en effet le grand socialiste américain Upton Sinclair, il est très « difficile d’amener quelqu’un à comprendre une chose quand son salaire dépend précisément du fait qu’il ne la comprend pas » !

Le retour de ce peuple théoriquement « disparu »

Or, le premier mérite des gilets jaunes, c’est justement d’avoir fait voler en éclats le mythe fondateur de la « sociologie » de gauche selon lequel le concept de « peuple » n’aurait plus, de nos jours, aucun sens politique, sauf à s’appliquer au seul univers des « banlieues ».

Car c’est bien, en effet, ce peuple théoriquement « disparu » qui non seulement fait aujourd’hui son retour en force sur la scène de l’Histoire, mais qui a même déjà obtenu – grâce à son sens politique exceptionnel et son inventivité rafraîchissante – plus de résultats concrets en quelques semaines que toutes les bureaucraties syndicales et d’extrême gauche en trente ans. Il fallait donc toute la cécité de classe des « écologistes » bourgeois pour ne pas avoir vu d’emblée que sous la question ponctuelle du prix de l’essence perçait déjà – pour reprendre les mots du remarquable Appel de Commercy – « un mouvement généralisé contre le système » et, au premier chef, contre cette confiscation croissante du pouvoir des citoyens par des politiciens de métier et des juges non élus. D’autant qu’il n’était vraiment pas difficile de comprendre – sauf à vivre, tels un BHL ou un Romain Goupil, sur une autre planète – que la revendication initiale des gilets jaunes relevait beaucoup moins de ce « culte de la bagnole » censé caractériser, aux yeux des élites « éclairées », les « beaufs » de la France périphérique (alors que toutes les études statistiques montrent au contraire que ce sont précisément les riches qui polluent le plus!) que d’une révolte morale spontanée contre un système économique aussi absurde qu’injuste qui – afin que les riches deviennent toujours plus riches – doit sans cesse obliger les Français les plus modestes à parcourir toujours plus de kilomètres pour pouvoir travailler, consulter un médecin, poster une lettre, faire leurs courses ou encore trouver une école, une maternité ou un centre administratif (c’est même une des raisons pour lesquelles les gilets jaunes ont si vite redécouvert les vertus de la démocratie directe et de l’autonomie locale). Quel que soit donc le sort qui attend, à court-terme, ce mouvement révolutionnaire (…) il est d’ores et déjà certain que la colère du peuple ne retombera plus. Et que, tôt ou tard, les « princes qui nous gouvernent » auront à en payer le prix.

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Note :
1) Il est difficile de ne pas songer ici au célèbre ouvrage de Paul Lidsky, Les écrivains contre la Commune, publié par Maspero en 1970. Dans cet essai décapant, l’auteur rappelait comment les principaux écrivains de gauche de l’époque – mettant de côté, pour un temps, leurs griefs habituels contre la bourgeoisie et le « vieux monde » – avaient, dans leur immense majorité, applaudi la répression de la Commune de Paris (ordonnée, il est vrai, par Adolphe Thiers et Jules Favre – deux des plus grandes figures de la gauche libérale d’alors). C’est que l’appel de cette dernière à instaurer une véritable république sociale avait donné d’un coup une tout autre signification au vieux concept libéral et républicain d’égalité. De quoi confirmer, en somme, la célèbre analyse de Marx selon laquelle, s’il existe toujours « une certaine opposition et une certaine hostilité » entre la bourgeoisie économique de droite (celle qui participe directement au processus d’accumulation du capital ») et la bourgeoisie culturelle de gauche (les universitaires, écrivains ou artistes qui « tirent leur subsistance principale de l’illusion que cette classe se fait sur elle-même »), c’est une opposition et une hostilité condamnées à tomber d’elles-mêmes « chaque fois que survient un conflit pratique où la classe tout entière est menacée ».

Source : Sud Ouest, Jean-Claude Michéa, 18-12-2018

21/12/2018

Long débat en terrain propice (Aude Lancelin, Emmanuel Todd, GJ, etc...)

https://www.facebook.com/LeMediaOfficiel/videos/130795339...

 

 

20/12/2018

La France (d’en haut) a peur : demain le RIC... après-demain la peine de mort ?

Ci-dessous article de Vera Mikhaïlichenko sur Agora Vox.

 

En aparté: quelle bande  de nazes ...   :o)

 La peur est depuis toujours le principal outil de manipulation .

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La France (d’en haut) a peur : demain le RIC... après-demain la peine de mort ?

La diabolisation du RIC et de son principal promoteur, Étienne Chouard, marche à fond depuis quelques jours dans nos médias... Saurons-nous y résister ?

Le référendum d'initiative citoyenne ou populaire (RIC ou RIP) est progressivement devenu l'une des revendications centrales des Gilets jaunes. Selon Étienne Chouard, il s'agit même de « la cause commune des Gilets jaunes ».

Éléments de langage LREM : "RIC et badaboum... on se réveille avec la peine de mort"

La classe dirigeante, elle, est beaucoup moins enthousiaste à cette proposition. Elle apparaît même terrorisée par ce RIC. Passons en revue quelques réactions.

Bruno Bonell, député LREM, nous met en garde :

« Si on faisait des référendums les gens voteraient pour la peine de mort et seraient beaucoup plus durs sur l’immigration. »

 

Stanislas Guerini, délégué général de la République en Marche et député, tire la sonnette d'alarme : 

"Je ne veux pas que demain on puisse se réveiller avec la peine de mort dans notre pays parce qu'on aura eu un RIC, parce que Laurent Wauquiez un jour se sera réveillé en disant 'tiens si on faisait la castration chimique pour les délinquants sexuels'... et puis badaboum le lendemain on a le RIC, et c'est effectif dans notre pays. Moi, je crois aussi à la démocratie représentative."

On voit que les députés de la majorité se sont passés le mot pour effrayer la population avec l'épouvantail de la peine de mort. Jouer sur les peurs, ils savent faire.

Or, comme l'a justement souligné Marianne, Stanislas Guerini n'envisage qu'une "vision radicale du RIC", "sans envisager les limitations possibles de ce dispositif". Le magazine envisage, lui, la possibilité d'un "RIC encadré", ne pouvant porter que sur certains sujets délimités au préalable :

"C'est le cas aux Etats-Unis, où les référendums d'initiative citoyenne en vigueur dans plusieurs Etats ne peuvent remettre en cause la Constitution de l'Etat fédéral, ni celle du territoire en question. En 1995, une loi votée par les citoyens de l'Arizona a par exemple été annulée par la Cour suprême car elle modifiait la Constitution de cet Etat.

Or, Stanislas Guerini ne cite pas cette hypothèse, envisageant seulement un "RIC" portant sur les questions les plus sensibles. Selon l'article 11 de la Constitution, le référendum d'initiative partagée concerne les textes qui ont trait à "l'organisation des pouvoirs publics" (hors Constitution), "aux réformes relatives à la politique économique, sociale ou environnementale de la nation et aux services publics qui y concourent" et à "la ratification d'un traité". Impossible dans ce dispositif, par exemple, de voter pour la castration chimique des délinquants sexuels.

On peut faire la même objection à l'argument massue du rétablissement de la peine de mort. Il n'est aujourd'hui pas possible, d'organiser un référendum d’initiative partagée sur cette question. L'article 66-1 de la Constitution dispose en effet que "nul ne peut être condamné à la peine de mort". En n'envisageant qu'une version radicale du referendum d’initiative populaire, le patron de LREM ne répond donc que partiellement à la question posée."

Comme on peut le lire dans Le Parisien :

"Pour rétablir la peine de mort, le référendum devrait pouvoir être constituant, comme le demandent une partie des Gilets jaunes. « Le seuil de signatures requis pour initier un tel référendum serait vraisemblablement plus élevé que le RIC en matière législative  », souligne Jean-Philippe Derosier, constitutionnaliste et professeur de droit public à l’université de Lille."

Le RIC vu par les chiens de garde = Fin de la civilisation, torture, guillotine, poison, Hitler...

L'avis du journal Le Monde, c'est que les consultations d’initiative populaire, si elles se limitaient à "des domaines convenus et sous contrôle du juge constitutionnel", pourraient "utilement revivifier l’exercice démocratique". Mais, "si elles se développaient tout-terrain et sans contrôle de constitutionnalité, elles ouvriraient la voie aux démagogies les plus débridées et les plus dangereuses".

Invité de France Inter ce 20 décembre, l'écrivain Jean-Claude Carrière nous offre de bon matin un joli point Godwin :

"Dès qu’il est question d’un référendum populaire, Mussolini et Hitler ne sont pas loin."

la suite ici

 

Etienne en 2014

résume ce qu'est devenue la démocratie représentative...

Quand tombe les masques...

 Toujours  Michel Onfray sur les G J

 

                                                ***

Quelle que soit son issue, le mouvement des gilets-jaunes aura au moins eu un mérite:  mettre à nu les rouages de ce régime corrompu jusqu’à la moelle depuis que les politiciens de tous bords, "gaullistes" compris, ont décidé de déconstruire ce qui fut le contrat social de la Cinquième République. A force de modifications, de changements, d'altérations, de rectifications, de retouches, ni l'esprit ni la lettre de cette constitution ne sont plus respectés. Nous vivons depuis des années avec une règle du jeu édictée par des faussaires ayant pour nom: Mitterrand et Chirac, Sarkozy et Hollande.

   Les logiciens connaissent bien l'argument du bateau de Thésée rapporté par Plutarque: pendant des siècles, on a gardé respectueusement la barque de Thésée, qui avait combattu le Minotaure. Régulièrement, les Athéniens changeaient les planches qui s'abîmaient. Un jour, il n'y eut plus une seule planche d'origine. Certains dirent alors que ça n'était plus son bateau; d'autres affirmaient au contraire que si; pendant que d'autres encore débattaient pour savoir avec quelle planche, la première rajoutée, la dernière enlevée, ou bien celle après laquelle les planches d'origine ont cessé d'être majoritaires, le bateau de Thésée n'a plus été le bateau de Thésée.

   Vingt-quatre lois ont modifié la constitution de 1958 jusqu'à ce jour! Sur les 92 articles de départ, il n'en reste plus que 30 d'origine! Elle est donc morte depuis longtemps... On fait semblant de la révérer, or elle est piétinée régulièrement par la classe politique dans l'intérêt de ses opérations de basse police, droite et gauche confondues. Qui peut bien imaginer que la cohabitation et le quinquennat puissent relever de l'esprit gaullien? Qu'un référendum perdu puisse être purement et simplement annulé par la coalition des politiciens maastrichtiens de droite et de gauche? Qui?

   Depuis Maastricht, les révisions qui concernent l'Europe vont dans le sens d'une destruction de la nation française au profit de l'État maastrichtien -Traité de Maastricht en 1992, Traité de Lisbonne en 2008. Cette constitution de 1958 est morte: elle est devenue un chiffon de papier, un torchon, une serpillère. Merci Mitterrand, merci Chirac, merci Sarkozy, merci Hollande -et merci Macron qui est un mixte des vices de tous ceux-là: cynisme, démagogie, vulgarité et incompétence...

   Les Français en général, et les gilets-jaunes en particulier ont bien compris que, depuis plusieurs décennies, leur constitution leur avait été volée. De Gaulle avait voulu l'élection du président de la République au suffrage universel direct à deux tours; un septennat avec des législatives à mi-mandat, ce qui permettait au chef de l'État de savoir où il en était avec le peuple et où le peuple en était avec lui: en cas de perte de la majorité à l'Assemblée nationale, le Président démissionnait, c'était la sanction du peuple; il pouvait alors se représenter et être réélu, ou pas; le référendum permettait au peuple de donner son avis sur des questions de société majeures: une fois l'avis donné, on le respectait. Quand de Gaulle a perdu le référendum sur la régionalisation, il n'a pas nié le résultat, il n'a pas fait voter les députés pour l'annuler, il n'en a pas fait un second, il n'a pas fait le contraire de ce qu’avait décidé le peuple: il lui a obéi et a quitté le pouvoir. Il y avait dans la lettre, mais aussi et surtout dans l'esprit de cette constitution, un lien entre le peuple et son souverain qui était alors son obligé.

  Aujourd’hui, c'est l'inverse: c'est le peuple qui est l'obligé de son président élu après que la propagande eut fait le nécessaire, c'est à dire des tonnes, pour installer l'un des voyageurs de commerce de l'État maastrichtien -depuis Mitterrand 1983, ils le sont tous... Le vote ne s'effectue plus de manière sereine et républicaine, libre et autonome, mais de façon faussée et binaire avec d'un côté le bien maastrichtien et de l'autre le mal souverainiste -la plupart du temps assimilé au fascisme. Cette caricature est massivement vendue par la propagande médiatique d'État ou de la presse subventionnée par lui. L'élection législative perdue n'induit plus la démission, mais la cohabitation; le référendum perdu ne génère plus l'abdication, mais sa négation. Quand le peuple dit au Président qu'il n'en veut plus, le Président reste... Et quand il part à la fin de son mandat, certes, on change de tête, mais la politique menée reste la même.

   Tout le monde a bien compris depuis des années que les institutions françaises sont pourries, vermoules, comme une charpente minée par les termites et la mérule: il s'en faut de peu que la maison s'effondre d'un seul coup, avec juste un léger coup de vent. Les gilets-jaunes sont, pour l'heure, un léger coup de vent...

   De même, tout le monde a bien compris que la représentation nationale n'est pas représentative: la sociologie des élus, députés et sénateurs, ne correspond pas du tout à la sociologie de la France. Il suffit de consulter la biographie des mandaté : ceux qui sont sur les ronds-points avec leurs gilets jaunes ne risquent pas d'avoir des collègues au Palais Bourbon ou au Palais du Luxembourg! Où sont les paysans et les ouvriers, les artisans et les commerçants, les marins pécheurs et les employés, les balayeurs et les veilleurs de nuit, les chauffeurs de taxi et les ambulanciers dans ces deux chambres? Nulle part... Les ouvriers représentent la moitié de la population active: il n'y en a aucun au Palais Bourbon -le PCF qui ne fonctionne qu'avec des permanents devrait s'interroger sur ce chiffre pour comprendre les raisons de sa crise... En revanche, on y trouve pas mal d'enseignants et de professions libérales, de notaires et d'avocats, des journalistes aussi. Les cadres et professions intellectuelles représentent 76 % des élus: c'est quatre fois et demie plus que leur part dans la population active. L'observatoire des inégalités a publié un texte intitulé "L'Assemblée nationale ne compte quasi plus de représentants de milieux populaires" (29 novembre 2018) qui détaille cette évidence: le peuple n'est plus à l'Assemblée nationale. Pour parler le langage de Bourdieu, on n'y trouve aucun dominé mais plus que des dominants. Dans les gilets-jaunes, c'est très exactement l'inverse: pas de dominants que des dominés!

   Si la sociologie des élus est à ce point peu populaire on comprend qu'elle soit devenue antipopulaire. Il n'est pas besoin d'aller chercher très loin les raisons du vote négatif du peuple au référendum sur le Traité européen ni celles qui ont fait des élus les fossoyeurs de ce même vote populaire. La démocratie directe a dit: non. La démocratie indirecte lui a dit: bien sûr que si, ce sera tout de même oui. Je date du Traité de Lisbonne ce clair divorce du peuple d'avec ses prétendus représentants.

   Qui peut croire que ces assemblées qui ne représentent déjà pas le peuple dans sa totalité puissent être crédibles quand chacun peut constater que le parti de Mélenchon, qui arrive quatrième au premier tour des élections présidentielles et n'est pas présent au second, dispose de dix-sept députés, pendant que celui de Marine Le Pen qui arrive deuxième et qui se trouve qualifiée au second tour, n'en a que huit? Quelle étrange machinerie politique permet à celui qui arrive quatrième d'avoir plus du double d'élus que celui qui arrive deuxième? Sûrement pas une machine démocratique...

   Pas besoin d'être polytechnicien pour comprendre que le mode de recrutement des élus est partidaire et non populaire; les découpages électoraux et les logiques du code électoral sélectionnent des professionnels de la politique affiliés à des partis qui les mandatent et non des citoyens de base qui ne peuvent gagner sans le soutien d'un parti; une fois au chaud dans les institutions, les élus font de la figuration dans un système qui évince le peuple et sélectionne une caste qui se partage le gâteau en faisant des moulinets médiatiques afin de laisser croire qu'ils s'écharpent et ne pensent pas la même chose, or sur l'essentiel, ils sont d'accord: ils ne remettent pas en cause la règle du jeu qui les a placés là;  au bout du compte, ceux qui gagnent sont toujours les défenseurs de l'État maastrichtien. Les gilets-jaunes savent que le code électoral, associé au découpage électoral opéré par le ministère de l'Intérieur avec l'Élysée, génère un régime illibéral -pour utiliser et retourner une épithète abondamment utilisée par les maastrichtiens pour salir les régimes qui ne les aiment pas donc qu’ils n'aiment pas.  Ce régime est illibéral parce qu’il gouverne sans les gens modestes, sans les pauvres, sans les démunis, sans les plus précaires, sans eux et malgré eux, voire contre eux. Sans ceux qui, aujourd’hui, portent le gilet jaune.

   C'est donc fort de ce savoir acquis par l'expérience que le peuple des gilets-jaunes ne veut plus rien entendre des partis, des syndicats, des élus, des corps intermédiaires, des députés ou des sénateurs, du chef de l'État et de ses ministres, des élus de la majorité ou de ceux de l'opposition, mais aussi des journalistes qui, de la rubrique locale à l'éditorial du journal national, font partie de tous ces gens qui ont mis la France dans cet état et ce peuple dans cette souffrance. La démocratie indirecte, le système représentatif, le cirque des élections: ils n'y croient plus. Qui pourrait leur donner tort?

   Voilà pour quelles raisons quelques gilets-jaunes proposent aujourd’hui le RIC -le référendum d'initiative citoyenne. Les journalistes qui estiment que les gilets-jaunes ne pensent pas, que leur mouvement c'est tout et n'importe quoi, qu'ils disent une chose et son contraire, qu'ils ne sont que dans la colère ou le ressentiment, de vilaines passions tristes que tel ou tel éditorialiste condamne dans son fauteuil de nanti, qu’ils sont des anarchistes ou des casseurs, qu'ils ne proposent jamais rien, ces journalistes, donc, sont bien obligés, en face de cette proposition majeure, de jouer les professeurs devant une classe de primaire en expliquant que le RIC, c'est du délire.

   C'est pourtant, au contraire, une pharmacopée majeure très adaptée à cette démocratie malade, sinon mourante. C'est un authentique remède de cheval qui donne la frousse aux dominants, aux corps intermédiaires, aux élus, aux rouages du système, parce qu'ils voient d'un seul coup leurs pouvoirs mis en péril alors qu'ils les croyaient acquis pour toujours! Quoi: "le pouvoir du peuple, par le peuple, pour le peuple, mais vous n'y pensez pas? Quelle idée saugrenue!". Si messieurs, justement: c'est la définition que donne le dictionnaire de la démocratie!

   Qu'est-ce que ce RIC? La possibilité pour les citoyens de réunir un certain nombre de signatures qui obligent le pouvoir à examiner la question faisant l'objet du RIC, soit au parlement soit sous forme référendaire. "Impossible!" disent les éditocrates comme un seul homme. Or ils oublient que c'est possible depuis des siècles en Suisse et que c'est d'ailleurs ce qui fait de la Confédération helvétique antijacobine une démocratie bien plus sûrement que notre régime oligarchique.

   A tout seigneur, tout honneur: le chevau-léger Stanislas Guerini (dans Marianne, le 17 octobre 2018 ), dont tout le monde ne sait peut-être pas encore qu’il est le patron de LREM, procède avec subtilité: Le RIC, c'est la possibilité demain de restaurer la peine de mort! Le RIC, c'est la certitude de la castration chimique pour les délinquants! Le RIC, ce pourrait même être, rendez-vous compte, il ne le dit pas, mais on voit bien qu'il le pense, la possibilité de sortir de l'État maastrichtien!

   A la République en Marche, on n'aime pas le peuple, trop grossier, trop débile, trop crétin, trop pauvre, trop bête aussi... Il suffit d'écouter cette fois-ci le président du groupe LREM à l'Assemblée nationale, Gilles Legendre, qui affirme quant à lui, sans rire: "Nous avons insuffisamment expliqué ce que nous faisons. Nous nous donnons beaucoup de mal, il faut le faire mieux. Et une deuxième erreur a été faite, dont nous portons tous la responsabilité : le fait d'avoir été trop intelligent (sic), trop subtil (sic), trop technique (sic) dans les mesures de pouvoir d'achat." (Marianne, 17 décembre 2018)

    On ne peut mieux dire que le ramassis d'anciens socialistes, d'anciens hollandistes, d'anciens Modem, d'anciens écologistes, d'anciens LR, d'anciens EELV, d'anciens juppéistes, d'anciens sarkozystes, enfin d'anciens anciens qui constituent la modernité révolutionnaire dégagiste de LREM, méprise clairement le peuple jugé trop débile pour comprendre que l'augmentation des taxes sur l'essence, sous prétexte de transition écologique, est un impôt prélevé sur les pauvres sans qu’ils puissent y échapper, puisqu'ils sont contraints de remplir le réservoir de leurs voitures pour travailler.

   Certes, Gilles Legendre est un intellectuel haut de gamme, puisqu’il dispose d'une triple casquette: journaliste, économiste, homme politique, ce qui, avouons-le, constitue trois titres de gloire dans l'État maastrichtien en général et, en particulier, dans la France, l'une de ses provinces depuis 1992. Lui qui a été élève à Neuilly, est diplômé de l'Institut d'études politiques de Paris, puis du Centre de formation des journalistes de Paris, qui a travaillé à Europe 1, au Nouvel Économiste, à L'Expansion, à Challenges, à L'Événement du jeudi de JFK aussi, qui accumule les jetons dans les conseils d'administration, comme la FNAC, qui a créé une boite de consulting, cet homme, donc, est aussi président d'un Observatoire de l'élection présidentielle -prière de ne pas rire... Il a été giscardien en 1974 -et n'a cessé de l'être depuis cette date...  

   Quelle morgue! Quelle arrogance! Quelle suffisance d'affirmer que le peuple est inculte, abruti, obtus, alors qu'il comprend très bien qu'on le tond depuis des années et qu'il ne le veut plus! En 2005, lors de la campagne contre le non au Traité européen, j'ai assisté à des réunions publiques où des gens simples et modestes qui ne sortaient pas de l'école de Neuilly, qui n'avaient pas usé leur fond de culotte à l'IEP ou au CFJ, qui n'avaient pas dirigé des journaux économiques libéraux, avaient sur les genoux ce fameux traité annoté, souligné, surligné, stabiloté: ils en avaient très bien compris les tenants et les aboutissants. A l'époque, ils ne voulaient pas être mangés à cette sauce-là. Ils ont donc massivement dit non. Des gens comme Legendre et autres giscardiens de droite et de gauche, dont les socialistes, le leur ont tout de même fait manger de force ce brouet. Mais cette fois-ci, les gilets-jaunes le disent dans la rue: ils ne veulent plus de ces gens, de leurs idées populicides, de leur monde dont Alain Minc dit qu'il est "le cercle de la raison", alors qu'il est bien plutôt le cycle de la déraison.

   Avec les gilets-jaunes, je prends une leçon: ce peuple que des années de politique éducative et culturelle libérale ont essayé d’abrutir, d’hébéter, d'abêtir, de crétiniser, ce peuple abîmé par des décennies d'école déculturée, de programmes télévisés décérébrés, de productions livresques formatées, de discours propagandistes relayés de façon massive par une presse écrite, parlée, télévisée aux ordres, ce peuple gavé comme des oies à la télé-réalité et à la variété, à la religion du football et à l'opium de la Française des jeux, ce peuple-là, celui dont j'ai dit un jour qu’il était le peuple "old school" et que je l'aimais, ce peuple: il pense. Et il pense juste et droit. Bien mieux que Macron, dont il est dit qu'il fut l'assistant de Paul Ricœur, et sa cour ou ses élus godillots.   

   On entend peu, très peu, pour ne pas dire pas du tout, le peuple "new school" jadis célébré par Terra Nova. Quand il parle, c'est plutôt d'ailleurs pour dire son soutien, donc sa collusion, avec les gens du système honni par les gilets-jaunes -voyez l'emblématique Mathieu Kassovitz qui tweete: "le peuple qui se bat pour protéger son confort je ne l'aime pas" (25 novembre 2018) -"protéger son confort", quand on est smicard ou à peine!  

   Sinon, ils sont bien silencieux les gens du show-biz, du cinéma, de la littérature, de la chanson, eux qu’on voit si souvent dans les médias pour combattre la faim et la misère, avec des majuscules, pourvu qu’on ne les oblige pas à prendre parti pour les faméliques et les miséreux, avec des minuscules, qui vivent au pied de chez eux... Ce retour de l'ancien peuple qui fait l'Histoire et souhaite dégager le vieux monde -le faux projet avoué de Macron- me donne le sourire.

Michel Onfray