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04/11/2014

Vous avez dit "Koan" ?

 

Comme beaucoup d'autres pratiques japonaises, le zen  est en réalité né en Chine vers le VIIiéme siécle, en tant que bouddhisme "Chan"...

C'est une période trés faste où il produit une littérature originale retraçant des anecdotes et entretiens de moines chinois.

(Il faut lire notamment les Entretiens de Lin-tsi, traduits et commentés par Paul Demiéville,Fayard, 1972)

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Ces échanges  brefs entre moines, maître et disciples, forment des ouvrages de compilations parfois épais.
Les courtes histoires qui les composent sont connues sous le nom de gongan ou plus encore comme kôan (à la Japonaise).
 
 
 
Ces koans sont liés à la notion de  pèlerinage spirituel, qui consiste à visiter successivement plusieurs maîtres, établis dans des monastères, des temples ou simples  ermites.
Ces longs cheminements à travers le pays ont un objectif: trouver un maître, capable d'éveiller ses interlocuteurs, par la rencontre même ou par son dialogue.
 
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Ces pèlerinages sont en effet des sortes d'exercice d'interrogation où l'on se confronte à l'autre par la parole.
Pour tous ces moines, le langage est presque un art martial où chacun recherche la "parole vive" qui les transpercera pour les faire accéder à l'éveil intérieur, l'illumination, le satori.
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 Les gongan/koans apparaissent le plus souvent comme des formules inattendues, provocatrices, déroutantes, ou paradoxales.
 
 
 
 
Quelques uns de ces koans sont trés connus:
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Par exemple:
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Si l'applaudissement est le bruit des deux mains, quel est le bruit d'une seule main?
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L'homme regarde le miroir, le miroir regarde l'homme.
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La voie est sous vos pieds.
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Le soleil de midi ne fait pas d'ombre.
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Ce qui te manque , cherche le dans ce que tu as.
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 Un moine demanda à Yunmen : « -Qu'est ce que Bouddha ? - Un bâton à essuyer la merde ! » répondit Yunmen.
 
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Où va le blanc quand fond la neige?
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 Recherchez la liberté et vous deviendrez esclave de vos désirs. Recherchez la discipline et vous trouverez la liberté.

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Mais évidemment hors contexte et relatés, commentés, recommentés, ces exttaits perdent beaucoup de leur impact lors de l'échange original...
 
 
Dans le même état d'esprit, même si ce n'est pas un koan au sens strict , mon histoire zen préférée est celle du samouraï sur le pont...
 
 
 
 
 
 
 
 

Le samouraï du pont

Un jeune moine se rendait en ville, porteur d’un pli important à remettre en mains propres à son destinataire. Il arrive aux abords de la ville et, pour y pénétrer, doit traverser un pont. Sur ce pont se tenait un Samouraï expert dans l’art du sabre et qui, pour prouver sa force et son invincibilité, avait fait le voeu de provoquer en duel les 100 premiers hommes qui traverseraient ce pont. Il en avait déjà tué 99. Le petit moine était le centième. Le Samouraï lui lança donc un défi. Le moine le supplia de le laisser passer car le pli qu’il portait était d’une grande importance.
- "Je vous promets de revenir me battre avec vous une fois ma mission accomplie."
Le Samouraï accepta, et le jeune moine alla porter sa lettre. Mais avant de retourner sur le pont, il se rendit chez son Maître pour lui faire ses adieux, certain qu’il était perdu.
- " Je dois aller me battre avec un grand Samouraï, lui dit-il, c’est un champion de sabre et moi je n’ai jamais touché une arme de ma vie. Je vais donc être tué..."
- "En effet, lui répondit son Maître, tu vas mourir car il n’y a pour toi aucune chance de victoire, tu n’as donc plus besoin d’avoir peur de la mort. Mais je vais t’enseigner la meilleure façon de mourir : tu brandiras ton sabre au dessus de ta tête, les yeux fermés, et tu attendras. Lorsque tu sentiras un froid sur le sommet de ton crâne, ce sera la mort. A ce moment seulement, tu abattras les bras. C’est tout..."
Le petit moine salua son Maître et se dirigea vers le pont où l’attendait le Samouraï. Ce dernier le remercia d’avoir tenu parole et le pria de se mettre en garde. Le duel commença.
Le moine fit ce que son Maître lui avait recommandé. Tenant son sabre à deux mains, il le leva au dessus de sa tête et attendit sans bouger. Cette attitude surprit le Samouraï car la posture qu’avait prise son adversaire ne reflétait ni la peur ni la crainte. Méfiant, il avança prudemment. Impassible, le petit moine était concentré uniquement sur le sommet de son crâne.

 


Le Samouraï se dit : "Cet homme est sûrement très fort, il a eu le courage de revenir se battre avec moi, ce n’est certainement pas un amateur."
Le moine toujours absorbé, ne prêtait aucune attention aux mouvements de va-et-vient de son adversaire. Ce dernier commença à avoir peur : "c’est sans aucun doute un très grand guerrier, pensa-t-il, seuls les maîtres de sabre prennent dès le début d’un combat une position d’attaque. Et en plus, lui, il ferme les yeux."
Et le jeune moine attendait toujours le moment où il ressentirait ce fameux froid au sommet de sa tête. Pendant ce temps le Samouraï était complètement désemparé, il n’osait plus attaquer, certain au moindre geste de sa part d’être coupé en deux. Et le jeune moine avait complètement oublié le Samouraï, attentif uniquement à bien appliquer les conseils de son Maître, à mourir dignement.
Ce furent les cris et les pleurs du Samouraï qui le ramenèrent à la réalité :
- "Ne me tuez pas, ayez pitié de moi, je croyais être le roi du sabre, mais je n’avais jamais rencontré un Maître tel que vous. S’il vous plaît, s’il vous plaît, acceptez moi comme disciple, enseignez moi vraiment la Voie du sabre..."